À l’heure où la moindre information est à portée de quelques clics et où internet nous donne la sensation de pouvoir tout accomplir en quelques secondes, le premier péril rencontré par les jeunes entreprises consiste à croire que l’on peut “commencer demain”, ou, à l’extrême opposé, “tout faire maintenant”.
Avant de vous expliquer plus en avant comment l’on peut verser bien malgré soi dans ces travers, puis de réfléchir à comment se prémunir de ces mauvaises habitudes, un petit disclaimer s’impose.
Avant-propos :
Cet article est le premier d’une série ayant pour but de sensibiliser et de faire réfléchir sur ce qui peut conduire le meilleur des projets à la faillite, si géniale que l’idée d’origine ait pu être.
Si j’ai choisi de communiquer sur ce thème, ce n’est absolument pas dans une dynamique professorale ou condescendante, bien au contraire.
Il n’y a ici aucun jugement de valeur, mon but n’est pas de pointer du doigt les gens qui tomberaient dans les pièges que je vais décrire au long de ces publications ; ce que je souhaite, c’est partager des expériences, qu’il s’agisse des écueils rencontrés par notre clientèle ou de mes propres échecs.
Certaines personnes le savent, j’ai commencé à entreprendre maladroitement et surtout très jeune, à 12 ans, en toute illégalité au regard de mon âge à l’époque, principalement pour des questions de survie.
J’ai échoué de nombreuses fois, appris tant bien que mal de mes échecs, persisté inlassablement.
Et je souhaite tout simplement communiquer sur ce que j’aurais aimé savoir lorsque j’ai débuté, il y a quelques décennies déjà.
Aussi, je vous invite à prendre ces articles pour ce qu’ils sont : des réflexions et des conseils et pas une tentative de m’ériger en donneurse de leçons.
Jean-Jacques Goldman l’a chanté, souvent, on a envie de commencer demain.
Puis, de fil en aiguille, demain devient après-demain, le surlendemain, le mois prochain, jusqu’à devenir jamais, parce qu’on laisse l’idée mourir.
Quand on remet à Demain, il remet à Jamais – Tiré de “Bref. Je remets tout à demain.”
Il est important de se rappeler qu’il n’existe pas davantage de moment idéal que d’idée parfaite.
Les anglophones affectionnent une expression clé à ce sujet : “better done than perfect”, que l’on traduit parfois astucieusement par “mieux vaut fait que parfait pas fait”.
Il n’y aura jamais un meilleur moment que celui où l’on a le temps, qu’il s’agisse de quelques heures pour avancer sur un prototype, de quelques minutes pour recueillir du feedback ou même de quelques secondes pour noter une idée.
Et pour cette raison, il est important de lutter contre un premier fléau qui met aisément à mal tout projet professionnel : la procrastination.
Commencer au mauvais moment parce qu’on remet tout à plus tard.
La procrastination est un phénomène que les gens pensent connaître et dont ils ne savent pourtant pas grand-chose.
Comme beaucoup de phénomènes mentaux impliquant une faible productivité dans une société capitaliste, la procrastination est vue comme une “flemme”, au même titre que la dépression est vue comme un “manque de volonté”.
Pourtant, la procrastination peut aussi être productive ; il y a des gens qui ne font pas ce qu’ils sont censés faire à un moment donné, mais s’affairent à une activité au moins aussi importante, un danger plus grand encore dans l’organisation parce que cela donne l’illusion que les choses vont dans le bon sens.
La procrastination est une manifestation de l’anxiété.
Point.
Procrastiner, c’est autant rester sous la couette en se disant qu’on le fera plus tard, que faire mille activités annexes, pourvu qu’on ne fasse pas celle qui occasionne l’affection mentale qui nous démange et nous blesse.
Dès lors qu’on ne traite pas la cause (trouver la source de l’anxiété et pallier le problème), on ne fait que reculer pour mieux sauter.
Et si la procrastination a une forme active et productive, le premier écueil, c’est le risque de burn-out.
Plutôt cocasse quand on parle de gens “feignants”, n’est-ce pas ?
L’autre écueil évident, c’est que les choses ne soient pas faites, ou pas dans l’ordre nécessaire.
Par exemple, au lancement d’une boutique en ligne, procrastiner la rédaction des diverses mentions légales, c’est une bonne façon de se faire épingler par la justice.
L’absence d’identification est sanctionnable, en France, d’un an d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende ; c’est cher payé pour ne pas avoir pris le temps d’identifier la raison de sa procrastination.
La justice étant clémente avec les débutants, il est plus probable d’aboutir à un simple rappel à l’ordre la première fois (sauf si ça s’accompagne d’autres plaintes, comme pour une absence de livraison), en revanche, vous pourriez vous retrouver mal noté sur des sites comme Scam Doc, qui évalue la confiance numérique (la fiabilité) d’un site et perdre un peu de clientèle, pour un simple document manquant, de quoi débuter du mauvais pied.
Cependant, contre toute attente, la procrastination n’est pas le seul danger dans le “timing” de vos affaires.
Et le second se trouve être son opposé complet : la précrastination.
L’excès inverse : le péril de vouloir tout faire tout de suite.
Le terme “précrastination” parle à très peu de gens et pourtant, encore une fois, en société capitaliste productiviste, il est monnaie courante : cela consiste à vouloir “rusher” tout ce que l’on doit faire, comme un bon petit soldat de la méritocratie.
Et, évidemment, ça conduit aussi au burn-out.
Seulement, vous devez vous dire que, quitte à mal faire les choses, la précrastination est probablement un péril plus doux, car au moins “tout est fait”.
Sauf qu’il y a des choses qui ne peuvent pas être réalisées dès le départ, en tout cas pas sans prendre le risque de conjuguer un burn-out avec un endettement colossal.
Par exemple, vous ne pouvez pas vous lever le matin, avoir une idée de business et avoir tout lancé le soir sans aucune action préalable.
Bien sûr que vous pouvez avoir créé votre boutique en ligne, rédigé toute la paperasse légale, avoir ouvert un compte en ligne, fait déclarer votre activité, etc, sauf que vous ne pouvez pas avoir réalisé, dans ce même délai, une étude de marché (même une étude de marché express, comme nous en proposons) ET recueilli assez de réponses ET trié les résultats qualifiés ET réajusté votre business plan ET avoir rédigé les routines de tout votre modèle ET avoir eu une journée de travail saine reproductible les autres jours de la semaine quand les questions que vous ne pouviez pas anticiper vont se poser.
Créer un modèle viable, c’est un marathon, pas un sprint.
Et si vous pensez que vous pouvez réussir en jouant les Usain Bolt dès la ligne de départ, vous tomberez avant le premier ravitaillement.
Et les conséquences de la précrastination sont rapidement visibles : le moindre retard d’un fournisseur, le moindre imbroglio avec un client sont autant de collines qui vont devenir des montagnes parce que vous n’aurez pas pris le temps de trouver votre souffle et votre foulée.
Et comme vous voudrez quand même tout gérer tout de suite, vous allez vous lancer dans une communication de crise.
La communication de crise n’est jamais une communication humaine, c’est une communication déshumanisante, qui va vous placer, dans le meilleur des cas, en phase 3 (on pointe du doigt les autres, mais vous inquiétez pas, on va rebondir parce qu’on est les meilleurs hein).
Et si vous tenez une année, vous aurez déjà réussi là où beaucoup échouent.
Et vous avez plus de chance que votre but survive à une procrastination, qui tôt ou tard sera traitée, par exemple en bossant avec quelqu’un qui peut gérer ce qui vous échappe si vous n’isolez pas la source de votre anxiété, qu’à une précrastination, qui a trop souvent pour source un besoin de tout contrôler, qui pousse bien souvent à refuser de s’entourer ou à s’entourer mais en ne laissant pas les gens agir.
Et si on a envie que son but vive au lieu qu’il survive au poids de nos affections ?
Commencer au mauvais moment se régule par les fiches de route !
Les fiches de route sont de puissants outils pour ne pas se retrouver à accomplir des actions au mauvais moment, qu’on parle de les faire trop tôt ou trop tard.
Elles sont aussi une manière de s’assurer, lors de leur conception, que le travail que vous prévoyez dans votre fiche de route est celui que vous êtes la seule personne à pouvoir faire et que le reste est délégué, voire éliminé.
Et pour en avoir la garantie, il convient d’utiliser deux outils puissants : la méthode QQOQCP et la matrice d’Eisenhower.
Kézako que ces outils ?
La méthode QQOQCP tient son “nom” des initiales des questions que nous devons nous poser pour chaque point de notre projet :
– Qui ?
– Quoi ?
– Où ?
– Quand ?
– Comment ?
– Pourquoi ?
Répondre à ces questions va permettre de se rendre compte de quelles ressources doivent être mobilisées pour les tâches à accomplir et dans quels délais.
C’est une bonne façon de ne pas précrastiner et se retrouver à ne pas avoir les compétences ou les moyens nécessaires.
Pour faire la feuille de route du projet, on va donc commencer par lister toutes les tâches obligatoires et appliquer cette méthode à chacune d’elles.
Et ensuite ? On passe à la matrice d’Einsenhower.
C’est très simple à utiliser : on prend une feuille, on la découpe en 4 quadrants dans lesquels on va inscrire les tâches à accomplir.
La ligne supérieure recueille les quadrants dont les tâches sont importantes, celle du bas, les autres tâches.
La première colonne va accueillir les quadrants dont les tâches peuvent attendre, celle de droite, les tâches les plus urgentes.
En gros, quelque chose comme ceci :

Enfin, pour constituer les fiches de route, on va se servir de cette matrice et du “qui” de la méthode QQOQCP.
De cette manière, chaque personne compétente va prendre en charge ce qu’il est nécessaire de faire ou de planifier, le reste pourra être délégué à qui de droit ou mis de côté jusqu’à ce que l’essentiel soit accompli.
En tout début de projet, la feuille de route va nécessairement comporter des tâches comme “identifier une aide juridique pour déléguer la question des contrats” ou encore “trouver un organisme pour gérer la comptabilité ou la logistique”.
Ne remettez pas ces tâches à plus tard, car moins vous déléguerez, plus ça vous coûtera, en temps et en santé (physique, mentale, financière…), personne ne construit un empire seul dans son coin.
Et si vous avez peur de ne pas savoir vous y prendre, notre équipe est là pour vous assister, n’hésitez pas à nous écrire pour nous demander de l’aide pour organiser le début de votre aventure pro !
Le plus grand obstacle à la vie est l’attente, qui espère demain et néglige aujourd’hui.
Sénèque
S’il est difficile de s’y mettre, un peu d’auto discipline peut faire l’affaire, par exemple en incorporant dans sa routine du début de journée de regarder sa fiche de route et s’attaquer aux tâches mentionnées avant de consulter ses emails ou les réseaux sociaux et en ajoutant à sa routine du soir une récompense pour les tâches accomplies.
De cette manière, on s’habitue (hormonalement, merci la dopamine) à faire ce qu’il faut et on réhabitue notre esprit à l’idée que déléguer et bosser en équipe, c’est positif, loin de l’endoctrinement de la méritocratie qui ne jure que par le génie individuel.
Car tôt ou tard il faudra se pencher sur le deuxième écueil que rencontre toute personne qui se lance à corps perdu dans l’aventure de l’entrepreneuriat, ce piège qui peut conduire au burn-out et que l’on a brièvement évoqué dans cet article : embrasser le mythe des “self-made (wo)men” et croire que l’on peut tout accomplir en solo.
Mais c’est une histoire pour un autre jour.
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